Lettre sur l'appelation du Bas-du-Cap
La lettre ci-dessous a été envoyé à ma conseillère municipale Sabrina Roy ainsi qu’au cabinet du maire de la Ville de Trois-Rivières et la section d’opinion du Nouvelliste. En date de la publication sur ce site, la lettre n’a pas été selectionnée pour publication.
Je pense qu’il est important de souligné que les “citoyens de Trois-Rivières [qui] se questionnent sur l’appellation « Bas-du-Cap » “ que mentionne le reportage de Radio-Canada est en fait une seule personne, un ex-employé de Radio-Canada qui ne semble pas habiter le Bas-du-Cap. Remplir un “slot” de Téléjournal avec l’opinion d’un ex-collègue… c’est le genre de reportage qui me rends vraiment fier qu’on envoie plus d’un milliard à Radio-Canada!
Bonjour,
Je suis à l’étranger maintenant et donc dans l’impossibilité de participer en personne aux consultations sur les quartiers. Heureusement pour les défendeurs de l’idée débile qui a fait l’objet d’un reportage le 26 octobre dernier sur le site web de Radio-Canada: https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2021270/trois-rivieres-quartiers-bas-cap
L’Homme est une machine a régler des problèmes. Tous les espèces le sont pour les problèmes qui sont les leurs, mais ce qui différencie l’homme de l’animal, c’est que son intelligence lui permet de se créer de nouveaux problèmes quand les plus urgents ont étés adressés.
Imaginez le zénith d’épanouissement nécessaire pour pouvoir avoir le loisir de cogiter ce nouveau non-problème. Il faut véritablement être aux plus vertigineux sommets de la pyramide de Maslow pour s’inquiéter de la nature péjorative du nom du Bas-du-Cap.
Péjoratif pour qui? Certainement pas pour mon voisin d’un certain âge, qui a vécu toute sa vie dans le quartier. Entre leurs semaines de 60 heures à l’usine et leurs autres obligations, lui et sa famille ont bâti collectivement quasiment un pâté de maison au complet, dont une qui est maintenant mienne. Drette comme une barre malgré avoir de loin dépassé son espérance de vie à la naissance, il viens souvent superviser scrupuleusement les travaux que je fais (plus souvent qu’autrement moi-même) pour pouvoir conserver ce qu’il a légué de sa sueur et de son sang.
Devrais-je informer ce brave monsieur du stigmate qu’il a porté à son insu toute sa vie du fait d’être le produit d’un quartier populaire? Devrais-je l’informer que le nom de l’endroit qu’il a contribuer à bâtir est une tare qui doit immédiatement être corrigée?
Assurément que les illuminés qui demandent un changement de nom ne sont pas du quartier, sinon ils auraient assurément des priorités plus pressantes. Comme moi, ils se demanderaient surement pourquoi dans un quartier dense et à relativement bas revenu, les trottoirs NE SONT TOUJOURS PAS DÉNEIGÉS dans l’année de notre Seigneur 2023, et que les rues les sont à peines, au point d’être quasiment impraticables en hiver. Ils se demanderaient aussi pourquoi nos élus considèrent des frivolités comme du mobilier urbain , une nouvelle image de marque et des changements de nom quand la priorité depuis plusieurs décennies est très clairement de trouver le jus de bras pour remettre en valeur un quartier aux bâtiments et aux habitants vieillissants. Certains diront qu’on peut marcher et mâcher de la gomme en même temps… certes, mais quand on a du chemin à faire, il faut surtout marcher.
À mes élus municipaux je dis donc catégoriquement: non au changement de nom. C’est une distraction indigne du lègue des familles, dont la mienne, qui ont bâti et habiter le Bas-du-Cap.
Aux pleurnichards qui formulent cette demande, je dis abandonnez la sémiotique du classisme au profit du sac à outils. Venez verser votre âme et votre argent plutôt que vos larmes et votre indignation dans ce quartier ayant des besoins réels, matériels. En bon voisin, j’irais vous aider, et nous pourrons rigoler ensemble de votre folie toponymique passagère autour d’une bonne Labatt 50, tablette.
Longue vie au BDC.
Addendum:
Le Nouvelliste a finalement publié mon éditorial, sans m’en informer d’une part, et sans faire approuver des modifications éditoriales non-signifiées. “L’année de notre Seigneur 2023” est devenue simplement “2023” dans la version publiée. Je suis déçu mais pas surpris de cette modification. (copie de la version papier dispo ici)
L’ex-Radio-Canadien a aussi répondu, et n’a manifestement pas compris ni mon argument contre le changement de nom, ni mon invitation à mettre de sa sueur et son trésor dans le quartier avant de penser à le renommer. Par contre, il a bien fait de nous situer avec son festival de clounes et ses consultations publiques… considérons-nous situés! (copie de la version papier dispo ici)